Les Joies du surf

à tous points de vue

Editions Rivages, Petite Bibliothèque

Préface et traduction : Fanny Quément

En route pour un tour du monde à bord de leur propre navire, Jack et Charmian London arrivent à Hawaï en mai 1907. Ils y découvrent, entre autres merveilles, le plaisir de surfer. Dans cet éloge fait de poésie et de précision technique, London pose notamment cette question : qu’est-ce qu’une vague ? Si la maîtrise de la matière est cruciale dans la pratique de ce sport, pour London, le secret du surf repose en réalité moins sur la force et la domination des vagues que sur une absence de résistance à leur déferlement, c’est-à-dire une forme de souplesse, d’abandon et d’humilité.

L’article de Jack London est suivi d’un texte de son épouse, Charmian, sur la même session de surf, à laquelle elle avait également participé. Un contrepoint qui vaut le détour !

https://www.payot-rivages.fr/rivages/livre/les-joies-du-surf-9782743662523


Un Gentleman à la mer

Plouf le banquier

Herbert Clyde Lewis

Postface et traduction de Fanny Quément

Henry Preston Standish, homme d’affaires et père de bonne famille, contemple un coucher de soleil à bord d’un paquebot quand une simple tache d’huile fait basculer son destin en le faisant passer par dessus bord, en plein milieu de l’océan Pacifique. Publié en 1937, « Gentleman Overboard » fait partie de ces petits livres oubliés dont la découverte est un plaisir délicieux. Il séduira tout particulièrement les amateurs d’humour noir.

https://www.payot-rivages.fr/rivages/livre/un-gentleman-%C3%A0-la-mer-9782743661144


Retour à Paris

Babylone revisitée

Francis Scott Fitzgerald

Préface et traduction de Fanny Quément

1929, le monde bascule dans la crise, et Fitzgerald avec. Dans cette nouvelle
autobiographique, l’auteur de Gatsby le magnifique troque la flamboyance des
Années folles contre les lueurs d’un Paris crépusculaire. Pour son
protagoniste américain, Charlie Wales, cette ville était celle du vice et de
tous les excès, si bien qu’il y a perdu sa femme, morte peu après une violente
dispute, et sa fille, désormais sous la tutelle de sa belle-sœur Marion.
Dévoré par le remords et la culpabilité, mais surtout très inquiet d’être
condamné à la solitude, Charlie tente de se racheter. Ayant refait sa vie à
Prague, il espère récupérer sa fille en prouvant à Marion qu’il est un nouvel
homme sobre et respectable. Mais il semblerait que retourner sur les lieux
d’un crime ne soit jamais une bonne idée.

https://www.payot-rivages.fr/rivages/livre/retour-%C3%A0-paris-babylone-revisit%C3%A9e-9782743659950


Ranjan Ghosh – Destins plastiques

romantisme granitique 2.0

Dans la revue Habitante, n°2.

https://revue-habitante.fr/catalogue/habitante-2

En 2012, la géologue Patricia Corcoran et la sculptrice Kelly Jazvac découvrent, sur la plage de Kamilo Beach à Hawaï, où l’océanographe Charles Moore dit avoir aperçu d’étranges conglomérats de plastique et de sable, 167 fragments de roches, de 2 à 22,5 cm de diamètre, présentant un mélange de basalte et de plastique fondu. Patricia Corcoran, Charles Moore et Kelly Jazvac insistent : ces roches, dénommées désormais plastiglomérats, sont des exemples d’une « action anthropique (la combustion) réagissant à un problème anthropique (la pollution plastique) ». Elles sont en effet les produits de feux de camp allumés sur la plage, et non, comme Charles Moore l’avait d’abord supposé, le résultat d’une interaction spontanée entre lave en fusion et polymères. Le texte de Ranjan Ghosh, paru initialement en février 2021 dans la revue Critical Inquiry, est lui-même un conglomérat, un montage de références et de signes composites. Il est en cela un pur produit de l’ère plastique, à l’image du plastiglomérat-roche et du plastiglomérat-œuvre transformé en ready-made par Kelly Jazvac. Si à la fois Ranjan Ghosh et Kelly Jazvac s’intéressent au plastiglomérat, c’est bien en effet parce qu’ils voient en cette roche l’incarnation d’une nouvelle Nature. Une nature qui n’existe pas en dehors de nous, ce qui reviendrait à continuer à nous penser séparés d’elle, mais une nature produite par nous, formée par nos représentations et actions. Ranjan Ghosh, penseur et professeur au Département d’Anglais de l’Université du nord du Bengale, nous rappelle ici que le monde-plastique que nous habitons est le même monde-plastique que nous fabriquons. Il se place ainsi dans une longue tradition de dévoilement et de déconstruction des récits dominants, dont l’Anthropocène est devenu le dernier exemple en date.

Jane Hutton – De rouille et de teck

Détailler les forêts

Dans la revue Habitante, n° 2

https://revue-habitante.fr/catalogue/habitante-2

Soixante gigatonnes de matière sont déplacées chaque année par les humains à la surface de la planète. C’est huit fois plus qu’au début du XXe siècle. Siècle durant lequel l’usage, la gestion et l’approvisionnement des matériaux se sont considérablement ramifiés à mesure que le design s’est spécialisé. Dans Paysages Réciproques, l’ouvrage dont est extrait le texte que nous publions, Jane Hutton distingue cinq histoires sociales et environnementales qui, parmi les méandres de ces mouvements matériels, relient les aménagements de la ville de New York aux sites d’extraction invisibles dont proviennent l’acier, le granite, les platanes, les fertilisants et en l’occurrence les bois exotiques. Contrairement à ce qu’indique le titre Paysages Réciproques, Jane Hutton décrit des échanges inégaux entre les sites d’extraction et les sites de mise en œuvre. Elle montre le flou des chaînes d’approvisionnement des matériaux, le manque de prise des politiques environnementales, l’échelle déconcertante de l’économie de marché qui rend la ressource invisible. Le mot réciproque, écrit-elle, « n’est pas destiné à adoucir, dissimuler, ou suggérer l’équilibre. Au contraire, son usage intentionnel a valeur d’aspiration. Lorsqu’il est associé au “paysage”, il souligne les interdépendances inextricables que les humains partagent avec le monde plus qu’humain, que les consommateurs partagent avec les producteurs. » Paysages réciproques est avant tout un exercice de pensée qui conçoit ces matériaux qui parcourent le monde comme une matière changeante, en constante évolution. Une matière façonnée par l’autre et qui le façonne en retour. Paysages réciproques s’inscrit résolument, sans qu’il en soit jamais vraiment question, dans le courant des humanités environnementales. Sa portée théorique est tenue à distance, et considérée à partir de la matière, du terrain, du détail biologique, du fait politique. L’enquête de Jane Hutton, c’est ce qui fait sa force, est menée à l’échelle globale, mais toujours à hauteur d’œil.

Petite anthologie de l’humour

Pêche aux perles

Un recueil compilé, traduit, annoté et préfacé par mes soins, et publié chez Rivages poche.

À l’origine, Mark Twain’s Library of Humour, un volume de 800 pages dans lequel je suis partie à la pêche aux perles. Les textes ne sont pas tous de Twain, qui de toute façon n’a pas foutu grand-chose dans l’histoire ; mais pour en savoir plus sur ce point, il faudra lire ma préface.

Au final, un amour renouvelé pour la satire et le pastiche, une histoire d’anthropophagie parlementaire, le portrait d’un grand magnat et celui d’un petit braqueur, le monologue d’un drôle d’oiseau, et de quoi tordre le cou au sentimentalisme.

Au passage, se plonger dans d’autres traductions, découvrir un texte fantastique grâce au travail des éditions L’Oeil d’or, se replonger dans Huck Finn même s’il n’est pas au programme, et ressortir le petit cahier à spirale avec les notes de l’an de grâce 2007, autant pour la spirale (forever Sheller, héhé) que pour les notes.

Avec une pensée pour les américanistes à qui je dois une grande partie de la culture et de la sensibilité qui m’ont permis de faire ce travail : Agnès Derail-Imbert, Cécile Roudeau et Pierre-Yves Pétillon.


Jennifer L. Allan – Les Sirènes des Shetland

Phares et cornes de brume

« Je m’étais figuré le son de la corne de brume comme un chant de solitude, comme le cri d’un grand monstre mélancolique qui résonnerait sur les vastes étendues des mers, généralement dans le vide. Mais j’avais tort. Le souffle de cette machine est le son de l’ami, le son de la civilisation, de la sécurité, de la régularité et du rythme. »

L’intégralité de l’article est disponible dans la revue Habitante, numéro 1.

Ryan Diduck – L’Age de la compression

Tout est sous contrôle

« [O]n peut voir la compression comme une technique permettant d’arrondir les angles d’un son, réduisant ses écarts de fréquence ou d’amplitude jusqu’à ce qu’ils correspondent aux standards des médias d’enregistrement et de diffusion, et ce pour empêcher, in fine, la détérioration ou la destruction des machines. L’automation du risque sur l’ensemble du marché se reflète dans l’automation du side-chaining propre à la production musicale, l’algorithme compresseur anticipant constamment l’attaque sonore, prédisant apparemment l’imprévisible tout en masquant son caractère régulier et inévitable. »

Extrait de « L’Age de la compression », article de Ryan Diduck traduit par Fanny Quément, disponible dans la revue Audimat, n° 16, et d’ici quelques mois sur CAIRN.

Poèmes élisabéthains

Chagrins, morts, désespoirs et tourments.

Ces poèmes (anonymes) de la Renaissance anglaise ont été mis en musique par John Dowland. Mes traductions sont vouées à rester au stade de l’ébauche comme jeu ou simple proposition.

Que les ténèbres soient ma demeure
 
Que les ténèbres soient ma demeure, son plancher le malheur,
Son toit le désespoir m’éclipsant toute allègre lueur,
Ses murs du marbre noir qui pleurera même sous la pluie,
Ma musique un enfer dissonant pour bannir le sommeil chéri.
Ainsi, uni à mes peines et couché dans ma tombe,
Ô, que je meure toute ma vie et que vienne enfin la mort.

Texte original : "In Darkness let me dwell"
Coulez, larmes de cristal
 
1
Coulez, larmes de cristal, comme les averses du matin,
Et gagnez tendrement le sein de votre dame.
Et comme la rosée ravive les fleurs qui fanent,
Que vos perles de pitié fassent leur chemin
Et réveillent en elle le souvenir de mon mérite
Par trop endormi sitôt que je la quitte.
 
2
Hâtez-vous, soupirs inquiets, et que votre souffle ardent
Fonde les glaces de son cœur endurci,
Dont la froide rigueur, comme la Mort est oubli,
Reste insensible à mon mérite avenant,
Pourtant je lui voue les soupirs et les pleurs
D’un cœur pur et d’yeux patients. 

Texte original : "Go Crystal Tears"
Je vis ma dame en pleurs  
 
1
Je vis ma dame en pleurs,
Et le Chagrin fier d’être ainsi montré
En ces beaux yeux où tout demeure parfait,
Son visage n’était plus que malheur ;
Mais un malheur (croyez-moi) à gagner plus d’âmes
Que la Gaieté n’en peut séduire de ses charmes.

2
Là, le Chagrin devint beauté,
La Passion, sagesse, les larmes, un plaisir,
Le silence au-delà de toute parole, une rare sagacité,
Elle fit chanter ses soupirs,
Animant le monde d’une tristesse si douce,
Que mon cœur fut soudain tant amour que chagrin.

3
Ô, toi dont la beauté
N’a d’égale en ce monde, sèche vite tes pleurs,
Assez, assez, ton allégresse triomphe,
Les larmes font périr les cœurs.
Ô, n’essaie point de triompher par ta peine,
Qui ne veut que défaire ta beauté souveraine.

Texte original : "I saw my Lady Cry"
Si mes complaintes pouvaient traduire les passions

1
Si mes complaintes pouvaient traduire les passions
Ou montrer à l’Amour en quoi je souffre injustement :
Mes passions suffiraient à prouver
Que mes désespoirs me gouvernent par trop longtemps.
Ô mon amour, en toi je vis et meurs,
Ton chagrin dans mes profonds soupirs résonne encor :
Tes plaies s’ouvrent à nouveau dans mon corps,
Sous ta rudesse se brise mon cœur :
Mais tu espères quand mon espoir s’est envolé,
Et quand j’espère, tu me fais espérer vainement,
Tu dis que tu ne peux soigner mes plaies,
Mais en retour, tu me laisses chanter mon tourment.
 
2
L’Amour peut-il être riche, et moi dans le besoin ?
L’Amour est-il mon juge, et moi son forçat? 
Tu as la fortune, mais ne m'accordes presque rien,
Tu fis un dieu, mais ton pouvoir tu méprisas.
Que je vive relève de ton pouvoir,
Que je désire relève de ton mérite,
Si l’Amour rend la vie des hommes trop amère,
Que je n’aime point et que la vie me quitte,
Que mes espoirs meurent, et non ma foi,
Pour que vous, éventuels témoins de ma chute,
Puissiez entendre du désespoir la vraie voix :
Je fus plus fidèle à l’Amour que l’Amour ne le fut envers moi. 

Texte original : "If my Complaints could passions move"

Traductions : Fanny Quément