Édition bilingue
En août 2015, je n’ai traduit qu’un seul poème de Leontia Flynn, mais cela justifie notre rencontre, à Belfast.
Un projet sur la traduction du sonnet vient de se monter dans l’université à laquelle je suis encore rattachée. L’occasion de me pencher sur les sonnets de Flynn, de l’inviter pour une lecture bilingue, et de faire publier le tout dans la foulée, chez Marguerite Waknine, en 2016.
Jamais aucun de mes projets éditoriaux ne s’est réalisé avec autant d’élan et de simplicité.
Dans l’addendum, j’ai écrit :
« Cette voix distincte, directe et incisive, émouvante et puissante, mais jamais grandiloquente, je voulais qu’on l’entende aussi, d’une façon ou d’une autre et dans la mesure du possible, en français. […] Il ne s’agissait pas simplement de faire passer le sens d’une langue à l’autre, mais d’accueillir dans ma voix de traductrice, qui est tout de même un peu aussi la mienne, ce que j’entendais de cette voix poétique. Il fallait passer d’une voix à l’autre, devenir l’autre d’une voix, faire en sorte que la traduction s’ajuste bien au texte original, comme une bonne doublure sur mesure, différente et pourtant semblable. Qu’on y retrouve le sens comme le son et la frappe, que je place ma voix comme Leontia Flynn avait su placer la sienne. […]
D’une voix l’autre. D’une voix les embrasser, les autres.
Cette autre que j’espère être devenue, il ne faudrait pas en oublier la pluralité. D’abord, Leontia Flynn en a d’autres, des autres. Bernard Leprêtre et Emmanuel Malherbet ont traduit sept des sonnets présentés ici. J’ai disposé très tôt de leur traduction, mais ne me suis autorisée à la consulter qu’après avoir travaillé sur les textes. Un premier jet et je pouvais enfin satisfaire ma curiosité, voir comment ces traducteurs associés s’étaient tirés de telle ou telle difficulté. Parfois, leur traduction m’amenait à reprendre la mienne sans pour autant copier la leur. J’ai donc eu le plaisir de revenir sur certains vers au fil d’un dialogue par livre interposé. Et puis d’autres traducteurs sont venus converser, car Leontia Flynn cite beaucoup, explicitement ou non, souvent de mémoire et non sans approximations. Là encore je m’en chargeais, au brouillon, avant de voir ce que les autres donnaient. C’est par exemple en adaptant la traduction du sonnet de Hopkins « No Worst There is None » par Jean Mambrino que j’ai pu faire rimer la version française de « Gerard Manley Hopkins ». Cette dimension conversationnelle pourrait sembler dérisoire. Elle m’est essentielle, quand bien même elle conduirait à ne modifier qu’une syllabe, un phonème.
D’une voix l’autre. D’une voix plurielle est l’autre. »



Aujourd’hui, au premier vers, j’écrirais plutôt : on sort, « dehors » —
Un peu plus loin : chaque moitié de phrase frivole et féminine
Mais sinon, je suis contente du reste, et surtout de la fin.